L'énergie de la terre
Entourée d'arbres majestueux et séculaires, à l'essence rare, plantés par Armand-Joseph Ivoy, paysagiste du Second Empire, cette paisible percée de verdure est l'une des premières que le voyageur effleure en montant, depuis Bordeaux, sur sa route du Médoc. Un havre aux portes de la ville, un haras pour des montures de grande lignée qui viennent ici en balnéothérapie comme vont en thalassothérapie de dignes dames aux cheveux gris, un premier asile de vignes médocaines que fonda autrefois Pierre Eyquem de Montaigne, dont une parcelle porte encore le nom, sous forme de trace.
Plusieurs vies habitent au château de Malleret, toutes légataires d'une passion entretenue depuis bientôt deux siècles par une même famille, aussi discrète que fidèle, les Clossmann. A force de discrétion, cependant, la réputation du cru avait fini par tant décroître qu'il fallut pas moins, depuis dix ans, que l'énergie de Paul Bordes, venu en gérant du redressement, et l'enthousiasme d'Aymar du Vivier, l'artiste de la famille, pour redonner à Malleret son rang en haut-médoc.
S'appuyant sur l'expertise fine des consultants Stéphane Derenoncourt et Hannah Fiegenschuh, les deux hommes ont remis Malleret en selle en repartant de là où tout doit commencer : la terre. Cette terre de vignes qui n'est jamais si vivante que lorsqu'on la travaille, qu'on l'aère, qu'on la sème, qu'on la nourrit de matières organiques. Cette vaste terre, 60 hectares de vignes en conversion à la viticulture biologique.
A Malleret, Derenoncourt capte « beaucoup d'énergie ». Elle se transmet dorénavant aux vins. Aux rouges comme le 2020, enfin racé plus qu'élégant, avec ses beaux tanins poudrés. Mais aussi aux blancs étonnants, tel le 2020 encore, un 100 % sauvignon d'une grande délicatesse, avec sa fraîcheur assumée et sa longue empreinte en bouche. Laisser son empreinte, Malleret y parvient.